Que dire de Shinju ? Eh bien… commençons déjà par son apparence… Il s’agit d’un garçon âgé de dix-sept ans, atteignant les un mètre cinquante-cinq. Il est plutôt mince, cela se remarque à sa silhouette élancée. Notre jeune homme possède des cheveux blonds, lesquels se trouvent être à la couleur de l’hermine sous la lumière du soleil. Il les coupe a raison d’une fois tous les deux mois, les longues mèches le dérangeant plus qu’autre chose… Sa frange effilée retombe sur son front, masquant de cette même manière ses sourcils fins. Ses yeux quant à eux sont d’une bien étrange couleur, étrange mais pas laide pour autant. Shinju possède un regard vermeil, semblable à la couleur du sang; chose qu’il a hérité de son père. Le reste de son visage ? Eh bien il possède deux oreilles, un nez et une bouche tout ce qu’il y a de plus normal…
Comme vous l’aurez sans doute remarqué, notre jeune homme est plutôt petit de taille… toutefois, il n’en est pas moins aussi, voire même plus, rapide que les autres. Voilà sans doute l’une de ses plus grandes qualités en tant que joueur de football…
Pour ce qui est du style vestimentaire, on peut dire que Shinju privilégie plutôt les tenues sobres… Il est, le plus souvent, vêtu d’un tee-shirt quelconque, au-dessus duquel se trouve une chemise blanche, à manches courtes. Ajoutez à cela un simple pantalon noir, changé en short lorsqu’il fait trop chaud, et de simples chaussures. On ne peut effectivement pas vraiment dire qu’il soit du genre très voyant…
Passons à son mental à présent! Shinju est un gentil garçon, aucun doute là-dessus. Souriant et rieur, il est toujours prêt à aider les autres, cela quel qu’en soit le prix. Mais dites-vous bien qu’une grande différence est marquée entre Shinju en sport et le Shinju du quotidien. Sur le terrain, on ne peut nier le fait que, pour lui, il n’y a plus vraiment de distinction entre amis ennemis, son but étant de marquer un maximum. Il est rapide, rusé et préfère privilégier la réflexion, ce qui lui permet de trouver une faille dans l’équipe adverse. Mais malgré cela, Shinju a un gros défaut. La maladresse. Cette dernière semble le poursuivre, sans arrêt. Ne vous étonnez donc pas, il lui arrive souvent de se ramasser par terre, que ce soit pendant les matchs ou dans la rue… et une telle chose peut s’avérer assez problématique… Car vous imaginez bien qu’être à deux doigts de marquer, et de louper cette chance simplement à cause d’une gamelle, ça peut vite devenir agaçant…
Hors du terrain, il est aisé de remarquer que le jeune homme change du tout au tout. Adorable et naïf, on pourrait penser qu’il s’agit d’une toute autre personne. Il est gentil, peut être même trop, et aussi un peu niais sur les bords. Il a une vision… disons assez enfantine du monde. Il ne semble pas comprendre la méchanceté; et a aussi tendance à considérer n’importe quel inconnu comme son ami… Par ailleurs, il est extrêmement borné, peut être même autant qu’un troupeau de mules. Quand il a une idée derrière la tête, il est presque impossible que de la lui enlever. C’est un garçon très déterminé, à qui rien ne fait peur lorsqu’il a un but.
Autre chose ? Ah oui, c’est aussi une véritable pile électrique. Il passe son temps à courir, sauter et je ne sais quoi encore, et il est bien difficile de passer une journée entière à ses côtés sans finir complètement épuisé…
Au niveau de ses goûts, on peut dire que Shinju apprécie énormément le sport, ça vous l’aurez compris. Quand bien même il a une certaine préférence pour le football, il aime aussi la course, le tennis, et un bon nombre d’autres choses encore… L’une de ses activités favorites consiste à courir, que ce soit dans les bois ou en pleine rue, à courir le plus vite et le plus longtemps possible, en évitant de tomber toute les cinq secondes bien sûr... jusqu’à être complètement essoufflé… c’est dans ces moments-là qu’il se sent véritablement heureux, véritablement libre…
D’un autre côté, il n’aime pas les cours, durant lesquels il se voit forcé à être assis sur une chaise, sans pouvoir bouger. Il n’apprécie pas non plus cette fichue maladresse, qui semble tant lui coller à la peau, parce qu’il est parfaitement conscient que, sans cela, il serait bien meilleur. Mais que voulez-vous? Il ne peut rien y faire…

Deux personnes s’aimaient, mais ne parvenaient pas à avoir d’enfants. Mayuto et Akie formaient le couple parfait, un couple aimant, ne pouvant se passer l’un de l’autre. Le seul problème qui subsistait était bel et bien cette impossibilité à pouvoir enfanter… Ces deux amoureux désiraient fonder une famille heureuse. Ils vivaient à Toyohashi, dans une belle et vaste maison, et savaient que, de part leur situation aisée, les enfants ne manqueraient de rien...
Une idée germa alors dans leur esprit...
Quelques temps plus tard, ils prirent la décision d’adopter, sachant pertinemment que sans cela, leur rêve ne pouvait se réaliser. Leur choix se porta sur une fillette, âgée d’à peine un an; Aeka. Ne désirant pour rien au monde que cette dernière ne se sente seule, ils adoptèrent aussi un nourrisson qui n’avait pas encore été nommé. Ce fut à eux de lui trouver un nom; Shinju, ce magnifique prénom signifiant simplement "perle" . Car ils voyaient cet enfant comme un précieux trésor, et qu’un tel prénom lui allait à ravir.
Et ce fut ainsi que leur rêve se réalisa. En compagnie de ces deux enfants, leur vie n’était que joie et rire. L’intégralité de leur souhaits et espérances se retrouvaient en ces deux adorables bambins. Après s’être posé la question bien plus d’une fois, ils prirent la décision de ne jamais leur avouer la vérité, et de les traiter comme leur véritable fils et fille. Cela, ils le regrettèrent amèrement par la suite…
Ainsi, la vie poursuivait son cours. Aeka et Shinju grandissaient, et l’on put vite remarquer entre eux de grandes différences pour ce qui était de l’apparence. Aeka avait de longs cheveux, couleur de jais, et des yeux tout aussi foncés. A l’inverse, le garçonnet était blond comme les blés, et possédait un regard vermeil. Les parents étaient de parfaits japonais, si bien que Shinju ne pouvait se retrouver en eux. Malgré cela, il plaçait en sa famille une confiance aveugle, et durant de nombreuses années, la vérité ne lui vint jamais à l’esprit. Qu’importait les liens de sang! Puisque toute cette petite famille était unie…
Le temps passait, et jamais le bonheur ne s’estompait. Shinju et Aeka avaient grandi sans jamais connaître la tristesse. La fillette avait à présent huit ans, tandis que son cadet en avait sept.
L’on avait découvert chez Shinju un certain talent pour ce qui était du sport. Personne ne pouvait nier le fait que le garçonnet était un enfant qui appréciait énormément le fait de pouvoir courir… Ce fut pour cette raison que Mayuto et Akie prirent la décision de l’inscrire dans un club sportif. Hormis son étonnante maladresse, Shinju devint, en moins de deux semaines, l’un des meilleurs élèves de ce club, cela sans trop se surmener. Un sport en particulier semblait capter son attention; le football. Et il développa pour cela un talent remarquable. Il ne tarda donc pas à cesser les enfantillages, qui consistaient à taper dans le ballon au jardin, afin de se consacrer à de véritables matchs. Là encore, il fit la fierté de ses parents. Shinju avait un grand potentiel. Dès lors, il prit la décision de s’entraîner davantage, ayant pour but de surpasser les autres, alliés comme ennemis. Et plus le temps passait, plus il s’améliorait.
De nombreuses années plus tard, il pouvait se vanter de battre la plupart des joueurs des alentours, du moins pour ce qui était de la vitesse… Lui, ses parents, sa sœur, tout ce monde étaient heureux. Mais ça ne pouvait durer éternellement, Shinju eut l’occasion de s’en apercevoir durant une chaude soirée d’été. Notre jeune homme, à présent âgé de quatorze ans, descendait les escaliers qui menaient au salon, ayant dans l’intention de faire part à ses parents d’une chose tout à fait banale. Ces deux derniers se trouvaient être en conciliabule. Sa curiosité fut piquée au vif, et il se tint derrière le mur, prêtant une oreille attentive à leur parole. Akie et Mayuto en étaient venus, suite à un changement de sujet, à parler de leur deux enfants, de cette adoption depuis si longtemps démentie. Ils affirmaient qu’ils ne regrettaient le fait de leur avoir caché la vérité, qu’ainsi, tout était bien mieux. Au départ, Shinju ne prit pas cela au sérieux, ces paroles abracadabrantes ne pouvaient le concerner lui et sa sœur… Du moins, c’était ce qu’il désirait croire… Mais il ne put se voiler la face bien longtemps; les noms de Shinju et Aeka parvinrent à ses oreilles tel un sombre verdict. Quelques secondes. En seulement quelques secondes, toute sa vie, tous ses souvenirs, tout se retrouva détruit. Il ressentit un grand vide, une incompréhension totale de toutes ces paroles. Désespérément, il les tournait et retournait dans sa tête, ayant l’espoir de leur trouver un autre sens, d’avoir la certitude de s’être trompé sur toute la ligne… Rien de cela n’arriva. Il n’était pas leur fils, du moins, pas biologiquement. Il avait été stupide d’avoir cru à une telle chose. Preuve en était par la clarté de ses cheveux… Mais peut être l’avait-il toujours su en fin de compte ? Peut être s’était-il contenté de se mentir à lui-même… Il ne savait pas, ou plutôt, ne savait plus. Tout se mélangeait dans sa tête, si bien qu’il ne pouvait discerner le vrai du faux.
Ce furent des bruits de pas qui le ramenèrent à la réalité. Aeka venait de descendre les escaliers à son tour, et se retrouva ainsi devant son frère. Elle se contenta de lui lancer un regard compatissant. Shinju n’eut besoin d’aucune explication sur le pourquoi du comment. Il lui avait suffi d’un brin de lucidité pour comprendre. Pour comprendre le fait que cette dernière était aussi au courant. Trahit. Trahit par toute sa famille. Du moins, il s’agissait de son impression.
Mayuto et Akie firent leur apparition dans le couloir. Shinju ne réfléchit pas, et franchit la porte d’entrée. Il se mit à courir, le plus rapidement possible, ignorant sa sœur qui était à ses trousses. Il ne savait ce qu’il faisait, et semblait agir sur un coup de tête. Il traversait une route quand Aeka l’interpella. Séparé d’elle par la rue, le jeune garçon stoppa sa course, essoufflé. Elle lui dit certainement la même chose qu’auraient dit les parents, à savoir que les liens de sang n’avaient rien à voir ici, que ce qui comptait, c’était l’amour qu’ils leur avaient apportés à tout deux. Aeka eut l’intention d’approcher Shinju, et s’engagea ainsi sur la route.
Après, tout se passa très vite.
Trop vite.
La jeune fille n’eut le temps de réagir, et se retrouva projetée quelques mètres plus loin par une voiture, roulant bien trop vite.
Plus tard, la famille apprit qu’elle mourut sur le coup.
Quand les parents arrivèrent, quelques secondes après, ils aperçurent leur fille, étendue sur la chaussée. Shinju quant à lui était resté figé. Trop de choses avaient eu lieu dans la même journée pour qu’il n’y comprenne quelque chose… Il restait sur le bord du trottoir, à genoux, laissant les larmes couler sur ses joues. Quand Mayuto s’approcha, il ne fit absolument rien, se contentant de fixer le sol. Il lui demanda ce qui était arrivé, mais le père n’obtint aucune réponse. Alors, complètement à bout de nerf , et sous le choc, il frappa. Shinju eut droit à une gifle. Quand bien même il ne réagit pas, je peux vous assurer que jamais il n’oublia ce geste. Il avait le sentiment d’avoir tout perdu, en moins d’une heure. Ses parents, sa sœur… tout cela par sa faute à lui… Il s’en voulut atrocement…
Dès lors, Shinju changea du tout au tout. Le garçon souriant et joyeux avait disparu, pour laisser place à un jeune homme morne et sans volonté. Il resta ainsi durant de nombreux mois. La perte de sa sœur l’affligea à un point que vous ne pouvez imaginer, et ses parents ne l’aidèrent en rien à surmonter cela… Shinju passa de l’enfant adoré à l’enfant haït. Il semblait être, à leurs yeux, l’assassin d’Aeka, si bien qu’il dut endurer un grand nombre de choses. Les reproches, en tout genre, faisaient dès à présent partie de son triste quotidien. Et plus d’une fois, il se fit frapper, sans même qu’il ne sache pourquoi…
Il sombra alors dans la désespérance et la solitude, n’ayant plus goût à rien, pas même pour le football. Il resta cloîtré dans sa chambre durant des journées entières. Personne ne put contester le fait qu’il fut très malheureux. Il resta ainsi durant près de deux ans. Deux ans entiers. Deux ans de pur malheur. Son salut, il ne le doit qu’à une seule chose.
Un beau jour, alors qu’il était âgé de seize ans, il se retrouva par hasard confronté à un ballon.
Il eut un certain réflexe, et se mit à shooter dans ce dernier. Au départ, ses tirs se firent hésitants, mais au fur et à mesure que le temps passait, il prit de l’assurance et du plaisir. Il resta ainsi durant un long moment, à jouer comme avant, à courir derrière le ballon quadrillé dans le jardin. De cette façon, il se sentit vraiment revivre. Comme si le lourd fardeau présent sur ses épaules depuis un certain temps s’estompait légèrement; ce fut un soulagement pour lui. Le soir même, il s’endormit avec le sourire aux lèvres. Ce fut la première fois, depuis deux longues années de noirceur.
Les semaines passèrent, les mois… Le changement en Shinju s’opéra en fort peu de temps. Malgré les reproches incessantes de sa famille, il mena une vie à peu près heureuse, chose qui lui était impossible sans le sport. Il regagna bien vite le sourire, et redevint le même que trois ans auparavant. Mais ne vous fiez pas à cela, il n’a absolument pas oublié le drame qui s’est produit par sa faute. Ce dernier le hantera sûrement à tout jamais.